Banale, cette histoire est banale. L’histoire d’un type, amoureux d’une autre. L’histoire de l’autre, amoureuse du boug. Les papillons dans le ventre, le cerveau qui voit la vie en rose, le cœur qui palpite. Tous deux ressentent la même chose au même moment, sont impatients de se retrouver. Lorsqu’il faut se quitter, les adieux n’en finissent plus. Le monde autour n’existe pas. C’est le temps de l’insouciance où rien n’est grave et tout est beau.

Quelques années plus tard, le type est à l’arrêt sur son vélo à un feu rouge. Il lève la tête sur la droite et avise un instant un joli couple. Ils ont à peine la vingtaine, s’enlacent en riant bêtement et se prenant en photo. Leurs gestes sont complices, tendres, ils sont heureux. Lui replonge dans ses souvenirs. Son quotidien a bien changé depuis lors. La routine a progressivement pris le dessus. Les habitudes et la complicité ont remplacé les premiers émois. Ils ont affronté plusieurs épreuves ensemble, leur embarcation a tangué mais jamais chaviré.

Il lui semble qu’une éternité s’est écoulée depuis ce temps et pourtant c’est comme si c’était hier. Le brouhaha des klaxons dirigés contre lui l’extirpent de ses pensées. Il reprend sa route et ses rêves avec. Oui beaucoup de choses ont changé depuis tout ce temps. Oui les sentiments ont pris une autre couleur, avec davantage de profondeur, ont emprunté des chemins de traverse. La route n’était effectivement pas tracée et si elle a emprunté des voies étonnantes, cocasses ou déroutantes, elle les a conduit jusqu’ici et aujourd’hui.

Quel luxe de pouvoir aviser ces jeunes couples et se dire qu’il vivait une version améliorée de leurs premiers jours. Une version moins naïve mais toujours aussi optimiste. Le bilan à dix ans était bon, très bon même. Il pouvait repartir pour la prochaine décennie avec entrain. Il sera temps d’y refaire un bilan intermédiaire.