Science-fiction

Par Valentin, le 9 octobre 2011

Ranxor 38 n’a jamais fait partie des cartes de l’empire. Quelle ironie du sort. Moi, Ptéron III, qui ai accédé au trône galactique à seize ans, me voilà à trente ans en train de construire des pièges à lapins sur ce caillou inhospitalier pour nourrir mes filles. Nous n’avons rencontré à notre arrivée que quelques babouins juste assez civilisés pour peindre avec leurs mains des formes indistinctes sur les murs de cavernes qu’ils n’éclairent qu’à la lumière du feu. Pas de générateur atomique en vue. La source qui alimentait notre vaisseau est en panne et j’ai bien peur que les cours de mécanique soient trop loin pour que je puisse un jour faire redémarrer l’engin. Il nous reste assez de batteries portatives pour tenir une semaine. Après ça, nous sommes aux mains des sauvages et de leur chef qui semble être une sorte de chamane. Ces pré-humains ont dû lire dans notre naufrage quelque signe des dieux : ils nous observent en gardant leur distance et déposent des offrandes près de notre campement. Des pierres taillées, des talismans sans doute…rien de très utile, et jamais de nourriture.

Quand je pense qu’il y a trois semaines encore je pouvais prendre en une seule matinée des dizaines de décisions cruciales pour les milliards d’individus sous la houlette de l’empire…connecté à mon interface de commandement neuro-mécanique j’étais capable de voir et de comprendre instantanément des centaines de peuples, de pays, de conflits, d’enjeux différents. Mon cerveau augmenté par les nano-puces pouvait synthétiser la galaxie dans sa globalité, la moindre de ses aspérités était à ma portée. Aujourd’hui je suis une divinité déchue, je ne perçois plus que ce que mes yeux veulent bien me laisser entrevoir, et mon cerveau ne fonctionne que dans les limites des capacités humaines. Si cet état m’est insupportable, mes filles semblent apprécier la perte des super-ordinateurs. Après des années d’utilisation les nano-puces étaient devenues une partie intégrante de mon corps, des organes supplémentaires. Pour Junia et Lirée ce n’étaient encore que des béquilles trop grandes, trop lourdes à porter. Ici elles vivent enfin dans l’insouciance dont leurs amplificateurs neuronaux les avaient privés, pendant que je suis torturé par la pensée que chaque seconde des térabits d’informations me sont envoyés sans me parvenir. Des armées attendent mes ordres, des étoiles meurent, des révolutions se font et je suis si ignorant, si impuissant…si humain.

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